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Photo du rédacteurJohanna Q.

La colère

La mort d'un bébé provoque un torrent d'émotions violentes et imprévisibles pour les parents. La colère s'exprime souvent avec intensité. Comme la révolte contre cette réalité inconcevable qu'est la mort d'un bébé. Ou le sentiment d'injustice de survivre à son enfant, dont le décès survient de manière brutale. Personne n'est prêt à affronter un tel drame. Ressentir de la colère est souvent inavouable et très dur à partager, c’est pour cela que cette émotion est souvent problématique et difficile à vivre durant le deuil périnatal.





La colère est une émotion légitime


La colère est légitime face à l’injustice que représente la perte d’un bébé. Elle est souvent très présente dans le deuil périnatal sans que l’on n’arrive nécessairement à l’identifier car elle peut prendre différentes formes. C'est pourquoi il est essentiel de rester à l’écoute de ses émotions. La colère peut être à l’origine des bouleversements les plus déstabilisants. En effet, niée et dirigée vers soi, la colère peut se transformer en une culpabilité constante et nocive. Un sentiment de colère refoulé peut également amener le parent à se couper des proches, à se replier sur soi-même. Il en veut à tout le monde, tellement sa souffrance est immense.

Comprendre ce que l’on vit, s’autoriser à ressentir de la colère est une étape importante sur le chemin de deuil. Mettre des mots sur les maux, c’est aussi prendre du recul pour mettre, l’espace d’un instant, la souffrance à distance. Ces moments de répit durant lesquels on peut reprendre son souffle sont vitaux. Identifier et accepter les émotions même les plus inavouables est un passage obligatoire vers l’apaisement.


Les cibles de la colère


Soi-même. La culpabilité est inhérente au deuil périnatal. La mère s'en veut terriblement de ne pas avoir réussi à mettre au monde un bébé en bonne santé, elle est en colère contre son corps qui n'a pas assuré sa fonction maternelle, son corps qui a défailli, qui a été le premier tombeau de son bébé. Le père s'en veut de ne pas avoir su protéger son enfant, il se sent terriblement impuissant, il peut en vouloir à ses proches de l'empêcher d'exprimer son chagrin. Les parents sont révoltés, ce n'est pas dans l'ordre des choses de survivre à son enfant.

Son bébé. Si la colère est une émotion qui dérange et dont on n'ose pas parler, comment avouer sa colère contre son bébé? Toutes les formes de colère sont légitimes, et les parents peuvent être amenés à en vouloir à ce bébé de les avoir privés de leur statut de parents, à ce bébé de les plonger dans un deuil auquel personne n'est prêt...


Dieu ou la destinée. Un sentiment de révolte peut naître contre ce Dieu d'injustice, contre cette funeste destinée, surtout quand le décès est brutal. Les familles endeuillées, profondément bouleversées, peuvent remettre en question leurs valeurs religieuses, spirituelles et philosophiques.

La médecine. Un sentiment de colère peut survenir à l'encontre du corps médical bien incapable de sauver le bébé. La sage-femme qui ne trouve pas le cœur du bébé, l'échographiste qui annonce la malformation aux parents, le gynécologue qui n'a pas pris le temps de lire le dossier. Dans certains cas, la famille peut être amenée à déposer plainte pour erreur médicale ou erreur de diagnostic.


L'entourage. Les parents sont souvent confrontés aux maladresses de certains proches qui formulent des phrases toutes faites ou voudraient que les parents avancent plus vite, et passent à autre chose. D'autres fuient, par peur de mal faire, mal dire et laissent les parents dans la détresse, dans la solitude de leur deuil indicible.


Le monde qui continue de tourner. Les parents doivent surmonter une terrible injustice. D’où un sentiment de colère par rapport aux autres qui continuent leur vie de façon insouciante et par rapport aux familles au grand complet. Voir leur ventre rond, leur poussette, leur bonheur peut profondément agacer les parents, leur donner le sentiment d’être seuls dans leur malheur.




Libérer la colère


Vivre les émotions violentes du deuil peut faire peur. L'important est de trouver le moyen d'exprimer pleinement le sentiment de révolte et de se sentir mieux.


Crier, hurler. Les parents ont besoin de crier leur rage. Seuls dans leur chambre, ils peuvent hurler dans un coussin, ou s'en servir pour taper dedans. Se réfugier dans la voiture ou rouler vers un coin isolé pour pouvoir laisser éclater leur colère.


Ecrire, lire. L'écriture est thérapeutique, elle permet d'exprimer son ressenti. Mettre des mots sur les maux sur un forum, un journal intime ou une lettre adressée aux personnes est libérateur. Lire d'autres témoignages peut également apaiser la colère, on se sent moins seuls.


Intégrer un groupe de soutien ou une association. Echanger avec des familles endeuillées permet de sortir d'un deuil solitaire et indicible, de libérer la parole et de verbaliser la souffrance.


Suivre une thérapie. Consulter un psychologue spécialisé dans le deuil périnatal afin de trouver un espace dans lequel les émotions sont accueillies sans jugement.


Faire du sport. Pratiquer la nage, le running, un sort de combat ou encore la danse est un très bon moyen de canaliser la colère. Se dépenser physiquement libère les endorphines et les tensions accumulées, c'est un excellent exutoire.




Pour conclure,


Les émotions négatives nous mettent mal à l'aise, leur intensité nous effraie. Pourtant c’est bien parce qu’elles sont violentes que ces émotions ont besoin d’être libérées, elles nous apprennent beaucoup sur nous-mêmes et sont nécessaires au processus de deuil. C'est pourquoi, il est important de les écouter, de les analyser, de les comprendre. Il sera plus facile de les accueillir et de les accepter.






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